Leborgne
“La RSE n’est pas un discours, c’est un cadre de décision”
société
05.11.2025

“La RSE n’est pas un discours, c’est un cadre de décision”

Leborgne structure son engagement et dépasse ses objectifs de décarbonation.

Après avoir porté la démarche RSE de Leborgne pendant plusieurs années, sa directrice générale, Florence Hocq, a structuré en interne une gouvernance ambitieuse, intégrée et collective. Avec l’arrivée d’un Responsable Qualité, Sécurité, Environnement et Responsabilité Sociétale des Entreprises (QSE/RSE), Hervé Bouton, en juillet 2023, la stratégie RSE s’est affinée, mesurée et déployée dans l’ensemble des services. Objectif : faire de chaque site, de chaque produit et de chaque collaborateur un acteur du changement. Ensemble, ils reviennent sur les avancées concrètes autour de la décarbonation, le pilotage transversal de la démarche, les innovations industrielles majeures et la nouvelle politique intégrée QSE et RSE qui guident les 14 engagements clés de l'entreprise. De quoi réduire l’impact de Leborgne… sans jamais renier sa performance industrielle.  

 

Leborgne clôture l’année 2025 avec la confirmation d’une belle reconnaissance : la médaille Platinum EcoVadis pour la troisième année consécutive, une référence en matière de Responsabilité Sociétale des Entreprises !

Hervé Bouton : L’entreprise progresse même de 4 points sur son score global, passant à 84/100, un signal fort de l'amélioration continue de notre performance environnementale. Cette reconnaissance Ecovadis est cruciale car elle valide la cohérence entre nos paroles, nos engagements et les actions menées concrètement. Cela nous aide également à dialoguer avec nos clients, nos partenaires, nos distributeurs. Leurs attentes étant de plus en plus fortes sur les engagements RSE.

Florence Hocq : Très (trop) peu d’acteurs de notre secteur obtiennent cette médaille. Cela nous positionne dans le top 1 % des entreprises évaluées dans notre catégorie au niveau mondial. Elle nous conduit à être transparents, à structurer notre démarche, à conserver notre degré d'exigence et à poursuivre notre amélioration continue, partie intégrante de la culture de Leborgne.

 

"En 2025, la RSE est davantage intégrée à nos réflexions stratégiques."

 

En effet, vous nous le rappeliez l’an passé dans une précédente interview : Leborgne fait de la RSE depuis de nombreuses années sans vraiment le faire savoir. Mais vous avez fait le choix de mettre en place une stratégie structurée et mesurée depuis votre première notation Ecovadis en 2020 (déjà médaille d’or)...

Florence Hocq : J'ai en effet porté le dossier RSE en 2019-2020 en répondant au cas par cas aux demandes de nos clients, et ce n'était plus gérable. J'ai rapidement ressenti le besoin de formaliser cette démarche et de la piloter avec notre Responsable QSE dès 2021. Nous avons ensuite accueilli Hervé en juillet 2023 ce qui nous a permis de structurer notre politique et mettre en œuvre nos ambitions. En 2025, la RSE est davantage intégrée à nos réflexions stratégiques. Elle est désormais pleinement intégrée dans nos choix d’investissement et nos priorités industrielles.

Hervé Bouton : Mon rôle, qui englobe la QSE (Qualité Santé Environnement) et la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises), est de piloter à la fois les certifications internes (ISO 3 normes, PEFC, FSC) et d'assurer notre amélioration continue sur ces questions. C’est ainsi que nous avons mis en place une nouvelle politique RSE et QSE commune, qui se substitue aux 2 politiques existantes. Cela prend tout son sens, car il y a énormément de sujets communs entre ces deux dimensions. Cette politique commune que nous publions sur notre page internet RSE se déploie désormais autour de quatre piliers fondamentaux qui guident l’ensemble de nos actions et décisions.

Conduire une gouvernance responsable pour :

  • Maintenir un développement économique éthique et confirmer un ancrage territorial
  • Garantir un cadre de travail sain et épanouissant
  • Renforcer un engagement environnemental pour réduire nos impacts
  • Fournir des outils durables, au service de la santé et sécurité de nos utilisateurs

Ces piliers donnent une cohérence d’ensemble, ils nous obligent à avancer concrètement, avec des indicateurs et des choix forts, identifiés autour de 14 engagements.

 

Et ça paye ! Le dernier bilan carbone a présenté des résultats très encourageants...

Florence Hocq : Nous nous étions fixé un objectif ambitieux d'améliorer de 15 % nos émissions carbone sur deux ans. Nous avons renouvelé le calcul de notre bilan carbone fin 2024, et nous en sommes très satisfaits : nous avons atteint une amélioration de 19,5 % sur les Scopes 1 et 2. Nous avons largement dépassé notre objectif initial. Cependant, il faut rester prudents : l'empreinte carbone la plus importante se situe sur le Scope 3, notamment l'achat d'acier, notre principale matière première. Sur ce point, nous agissons là où nous avons la main : nos process internes et notre consommation.

Hervé Bouton : En effet, sur l’ensemble des produits fabriqués, l’acier représente toujours les 3/4 de nos émissions d’équivalent CO2. Mais le travail constant des équipes R&D et de notre BE industriel permet aujourd’hui de connaître, pour chacune de nos références produits, l’équivalent d’impact carbone que ce produit représente. Cela nous permet d'avoir un bilan beaucoup plus précis et d'orienter nos développements futurs.

 

"La relocalisation est un engagement fort

parmi les 14 que nous avons pris."

 

Quelles actions industrielles significatives avez-vous justement menées pour obtenir ces résultats ?

Hervé Bouton : Le remplacement de la trempe au sel par un procédé de trempe à induction est sans doute l'action majeure qui coche plusieurs cases. La trempe au sel était un procédé très énergivore, nécessitant un fonctionnement 24 heures sur 24 et 365 jours par an.

Florence Hocq : Il présentait non seulement une consommation énergétique forte, et des risques pour nos salariés, mais il générait aussi des déchets polluants et dangereux qui ne pouvaient pas être valorisés. Ce nouveau procédé est donc extrêmement vertueux.  Par ailleurs nous avons cherché à réduire la consommation de gaz pour le chauffage. Sur nos ateliers de La Rochette, nous avons par exemple installé des déstratificateurs avant l'été 2025. Ces dispositifs permettent de brasser l'air pour faire redescendre la chaleur accumulée au plafond, la rendant utile aux salariés et réduisant le besoin de chauffage constant. Nous avons également expérimenté des gilets chauffants pour les employés qui alternent entre intérieur et extérieur, cherchant à réchauffer le corps plutôt que l'air ambiant.

Hervé Bouton : En 2025, nous avons également engagé une réorganisation des flux logistiques pour limiter les transports et la relocalisation de la fabrication de certains produits en France et au sein des usines du groupe en France et en Europe. C’est un travail de fond et les premiers gains sont visibles.

Florence Hocq : La relocalisation est un engagement fort parmi les 14 que nous avons pris. On parle souvent de souveraineté ou de made in France. Pour nous, ce n’est pas un argument marketing, c’est une vraie manière de réduire notre empreinte, de gagner en agilité et de sécuriser notre qualité. En 2024, Leborgne a relocalisé 5 produits et lancé 3 nouveaux produits qui seront fabriqués en Rhône-Alpes. Nous faisons évoluer la conception pour qu'elle corresponde aux contraintes technologiques de nos usines internes dès le départ. À l’inverse, certains arbitrages restent complexes, notamment sur certains composants. Mais nous avançons !

 

L'écoconception est aussi un axe majeur de la politique RSE. Comment cela se traduit-il dans la fabrication des outils Leborgne ?

Florence Hocq : L'écoconception est intégrée par l'équipe R&D à chaque étape de développement ou d'amélioration de produit. Ils analysent le cycle de vie, la durabilité, la réparabilité. Nous nous assurons également de choisir des matériaux recyclés et recyclables. L'acier que nous achetons, par exemple, est déjà à 100% de l'acier recyclé de premier choix, en provenance d’Italie, donc d’une source très proche de notre site et en Europe. De plus, 100 % de l’acier et du bois utilisés dans nos outils sont recyclables en fin de vie.

Hervé Bouton : L’exemple du redesign de la gamme Coins bout pointu est révélateur. Nous avons retravaillé ces produits dans l'optique de diminuer encore plus les bavures de forge qui représentent un déchet de fabrication. Nous avons amélioré la performance de l'outil en retravaillant le taillant dont l'affutage est optimisé, contribuant aussi à une réduction des déchets de bandes abrasives. C’est ça, l’écoconception utile. C’est tout l'ADN de Leborgne. Il se retrouve dans nos gammes historiques. NaturOvert® promeut l'entretien naturel sans produits chimiques, avec des produits comme l'aérateur de compost qui facilite la décomposition. De même, la gamme SylvaPro® soutient la construction en ossature bois, un mode de construction sain et durable.

 

"Le but est d'infuser cet état d'esprit dans toutes les strates de l'entreprise, là où auparavant, il était surtout porté par un groupe de managers."

 

Un autre pilier concerne l'ancrage territorial. Quelles collaborations locales ont été mises en place ?

Florence Hocq : Nous avons un partenariat avec Savoie Pan, une entreprise très proche de la nôtre. Ils récupèrent nos déchets de bois et nos palettes non réutilisables pour les transformer en pellets de chauffage. C’est à la fois écologique et économique. De plus, nous travaillons avec l'association Acti'Val 73, créée par Cœur de Savoie, pour des travaux d'assemblage et de conditionnement simples. Cette association œuvre à la réinsertion professionnelle de personnes en difficulté, contribuant à l'emploi local et sociétal.

 

Et côté humain, comment embarquez-vous les équipes et assurez-vous l'adhésion et la mobilisation de vos collaborateurs ?

Florence Hocq : La structuration RSE a permis de mettre en place un Comité de pilotage (COPIL) qui se réunit une fois par trimestre. Nous avons nommé des pilotes pour chacun des 14 engagements. Ce ne sont pas nécessairement des dirigeants ou directeurs de services. Le but est d'infuser cet état d'esprit dans toutes les strates de l'entreprise, là où auparavant, il était surtout porté par un groupe de managers.

Hervé Bouton : Mon rôle est de coacher ces pilotes et de les accompagner individuellement pour le déploiement des actions. C'est un suivi continu. Cela permet de faire remonter l'expérience terrain et de s'assurer que les bonnes pratiques de l'un des sites sont déployées sur les autres. Nous avons également renforcé notre politique RH autour de la formation, du dialogue social et de l’éthique. En 2025, 100 % des collaborateurs ont été sensibilisés à nos engagements RSE. Cela passe par des sessions internes, mais aussi par des outils concrets : indicateurs d’impact, projets transverses, co-construction. La norme ISO 26000 nous guide sur ces aspects. Nous avons également mis en place depuis début septembre des écrans dynamiques sur nos deux sites pour diffuser en continu des informations sur les avancées des process industriels, les nouvelles politiques et les différentes actualités de l’entreprise.

Florence Hocq : Je suis convaincue que la RSE ne fonctionne que si elle est incarnée. Ce n’est pas une démarche descendante. Notre force, c’est notre équipe : des salariés impliqués, fiers de leur savoir-faire. La démarche RSE vient renforcer cette culture, en donnant du sens à ce que chacun fait au quotidien.

 

Les objectifs sont clairs pour les années à venir du coup...

Florence Hocq : Oui, le tout est de rester cohérents. Nous voulons continuer à faire des outils robustes, utiles, bien pensés, mais dans un cadre plus conscient, plus respectueux, plus exigeant. Et on veut le faire à notre manière : sobrement, mais sûrement.

Hervé Bouton : La RSE chez Leborgne, ce ne sont pas des grandes déclarations. Ce sont des actes, des arbitrages, des choix industriels. Et c’est ce qui la rend crédible.

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